mercredi 29 août 2018

Nuit de l'écriture @Bleue, Le syndrome des cigognes

Tout d'abord, je tiens à préciser que cette nuit de l'écriture est extraite du forum Mot à Mot dont je suis membre depuis 2014 et que je remercie infiniment d'exister.



"La cage se referme doucement."

C'est comme ça que ce livre se termine. Il y a des extraits qui traînent ici et là sur internet.

"Laura n'avait pas son pareil. Elle aimait tout particulièrement entrer dans la vie privée des personnes qui l'intriguaient. Elle était allée à cette soirée pour célibataires. Elle ne l'était pas mais le thème avait quelque chose d'original - Elle voulait faire un bébé toute seule ! Elle y avait rencontré Paul, un gars qui présentait bien sur lui, un sourire ravageur et des gestes qui glissaient comme un charme envoûteur. Les filles ne pouvaient s'empêcher de tourner autour de lui mais il semblait savoir ce qu'il voulait et quand je me suis approchée de lui, il a détourné son regard de cette grande brune pour me suivre vers le bar qui offrait une fleur et un carton d'invitation. Il s'est empressé d'attraper ma main pour me donner le sien et nous nous sommes assis au fond de la salle."

"Marius lui avait supplié de ne pas en tenir compte mais elle était partie.
- Tu croyais quoi ? Que j'allais fermer les yeux et faire comme si de rien !
- Laura, s'il te plaît, t'es pas facile non plus ! Tu disparais tout le temps sans rien dire, j'ai fini par croire que tu te jouais de moi et puis je t'ai vu aux bras de ce type
- quel type ?
- peu importe, je t'ai vu, j'étais fou de rage, je suis allé me vider la tête, j'ai bu un peu trop et cette fille était gentille, elle sortait d'une soirée décevante, nous avons commencé à parler et très vite, je l'ai embrassé, nous avions besoin de folie pour nous sentir vivants, nous avons couché ensemble, comme ça, sans réfléchir
- et la cigogne passera dans neuf mois !
- mais n'importe quoi !"

"En bas de la rue, il y avait ce mec qui vivait dehors avec son chien. Leurs gueules étaient déformées. Ses dents tremblaient comme si elles allaient se déchausser à chaque fois qu'il allait parler. Ses crocs avaient oublié de grandir et il semblait aussi inoffensif qu'un caniche malgré son impressionnante musculature. Il portait un grand manteau et lorsque je l'invitais à boire un café à la cafétéria du coin, il pouvait faire chaud, il ne le quittait jamais. Son chien attendait au pas de la porte en regardant attentivement les gens passer, j'avais vraiment cette impression. Ce mec aimait parler de la vie, avec beaucoup de philosophie et je lui racontais des morceaux de la mienne, à mon grand étonnement."

"J'ai trouvé dans ma poche un carton d'invitation, mon nom, une adresse de l'autre côté de la ville. Il était racorni, il sentait le bord de la rue."

Après tout, je ne peux pas empêcher mes lecteurs de graver sur la toile les mots que j'ai pris le temps de leur donner. Oui, je sais, c'est un peu, voir assez prétentieux et vous allez me dire que tout et n'importe quoi se trouve sur internet, ce n'est pas faux mais lorsque je lis leurs commentaires, ils sont sincères :

Ce livre est une réussite, les personnages sont captivants et l'intrigue parfaitement menée.

Le livre de l'année !

Il m'a été conseillé par un ami professeur et je ne regrette pas de l'avoir écouté, j'ai dévoré ce livre et j'attends avec impatience la séance de dédicaces prévue le mois prochain près de chez moi.

Bon, bien sûr, je ne vais pas vous mentir, certains n'ont pas aimé le titre ou la couverture mais, je dois vous avouer que je ne suis pas douée pour ça et j'ai fait appel à un programme. Et puisque je vous aime bien, je vous donne quelques autres extraits, histoire que vous puissiez la rabouter (j'adore ce mot).

"Ce matin, au-dessus du lac, les oiseaux aux longues pattes sont passées. Enfant, ma mère me racontait qu'elles étaient le signe d'un jour heureux. Je les ai suivies, elles volaient lentement, l'une d'entres elles s'est posée."

"- Allo !
- c'est Paul
- qui ça Paul ?
- Mister...
- vous connaissez Mister ?
- c'est le chien avec qui je vis Laura
- tu as un problème
- non Laura, j'ai une solution
- oh oh, tu m'intrigues toujours autant Paul, tu sais t'y prendre toi au moins !
- tu as le carton d'invitation tout racorni sur toi ? Puisque tu as jeté celui que je t'avais donné dans ce bar
- je ne sais pas... je crois oui... oui, je l'ai et alors ?
- vas-y, oublie Marius. De toute façon, il est occupé ailleurs
- je l'avais oublié bien avant cette fille de toute façon
- tu as vu les cigognes ce matin ?
- oui
- elle s'est posée ?
- oui
- c'est ton adresse. Tu as tous les symptômes
- mais de quels symptômes tu parles ?
- la cigogne que tu as vu, tu es la seule à l'avoir vu et je suis le seul a l'avoir vu."

Aux Éditons aléatoires.

Poème @Bleue, (été 2018.1)

Le banal a tout rempli.

Sur le bureau tu as sorti les verres
et une coquille prête à s'ouvrir.

Une faute de mauvais goût
avant l'ivresse
irréelle
du froid qui engourdit

encore.

(été 2018.1)

mardi 28 août 2018

Citations, Pierre Bourdieu et Nancy Houston

Quand je ne sais pas ce que je pense, j’écris.

Pierre Bourdieu


J'écris pour explorer ce que je ne sais pas penser.

Nancy Houston

Ecriture automatique @Bleue, SALES - big sis

Tout d'abord, je tiens à préciser que cette écriture automatique est extraite du forum Mot à Mot dont je suis membre depuis 2014 et que je remercie infiniment d'exister.



https://youtu.be/fZ1Jxef2hiE
                                                                       
Tes quoi, tes couacs, alone
t'es plus dans ma zone et

Tes quoique, t'es qui toi, alone
t'es trop monotone et
mais
tu sais
j'm'ennuie

Déchets, tes chairs, t'es cher
et t'es
chez moi
t'es plus ma faune et j'suis alone

Déveine, tes veines, t'es vain
et t'es
chez moi
t'es plus mon chrome et j'suis alone

T'es qui
t'es cher
t'es vain
alone
et puis j'm'enfuis
right

lundi 27 août 2018

Incas Yé @Bleue 25818.3

Il y a un écho qui meure
je l'entends qui pleure
c'est comme des ricochets qui s'enfoncent à jamais
25818.3

Extraits de lecture 100%, Ecrire

ÉCRIRE



Marguerite Duras, de son vrai nom Marguerite Donnadieu, est née en 1914 à Saïgon (alors en Indochine française) d'une mère institutrice et d'un père professeur de mathématiques qui meurt de dysenterie en 1921. En Indochine, la famille est ruinée et Marguerite rentre en France suivre des études de Droit. Pendant la guerre, elle participe à la Résistance et voit son mari, Robert Antelme, déporté à Dachau et revenir malade du typhus (elle en fera le récit dans un récit La Douleur paru en 1985). A la Libération, Marguerite Duras s'engage au Parti Communiste Français, en est exclue en 1950 mais continue de militer pour différentes causes comme la guerre en Algérie ou encore le droit à l'avortement. Cette année-là elle publie son troisième livre Un barrage contre le Pacifique, roman autobiographique qui sera adapté au cinéma. Elle-même se mettra plus tard à écrire des scénarios (Hiroshima mon amour en 1959) puis passera à la réalisation, adaptant ses propres livres (comme India Song en 1975). Elle écrit également des pièces de théâtre dès 1955 avec Le square puis viendront Des journées entières dans les arbres (1965) et aussi Savannah Bay (1982). Parmi ses livres clé on peut citer Moderato cantabile (1958), Le Ravissement de Lol V. Stein (1964) ou encore Le Vice-Consul (1966). En 1984, Marguerite Duras connaît un immense succès avec son roman L'Amant qui reçoit le Prix Goncourt. Malade de l'alcool depuis les années 80, l'écrivaine renouvelle les cures de désintoxication. Elle meurt à Paris le 3 mars 1996 à l'âge de 81 ans.

Texte sur le derrière de couverture :

"Il faut toujours une séparation d'avec les autres gens autour de la personne qui écrit des livres. C'est une solitude essentielle. C'est la solitude de l'auteur, celle de l'écrit. Pour débuter la chose, on se demande ce que c'était ce silence autour de soi. Et pratiquement à chaque pas que l'on fait dans une maison et à toutes les heures de la journée, dans toutes les lumières, qu'elles soient du dehors ou des lampes allumées dans le jour. Cette solitude réelle du corps devient celle, inviolable, de l'écrit. Je ne parlais de ça à personne. Dans cette période-là de ma première solitude j'avais déjà découvert que c'était écrire qu'il fallait que je fasse. J'en avais déjà été confirmée par Raymond Queneau. Cette phrase : "Ne faites rien d'autre dans la vie que ça, écrire." écrire, c'était ça la seule chose qui peuplait ma vie et qui l'enchantait. Je l'ai fait. L'écriture ne m'a jamais quittée."

Extraits de lecture 100%
:

Quand il y avait du monde j'étais à la fois moins seule et plus abandonnée.
P26

Ce bonheur-là, de mon fils, c'est celui de ma vie maintenant.

C'est curieux un écrivain. C'est une contradiction et aussi un non-sens. Écrire c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit. C'est reposant un écrivain, souvent, ça écoute beaucoup. Ça ne parle pas beaucoup parce que c'est impossible de parler à quelqu'un d'un livre qu'on a écrit et surtout d'un livre qu'on est en train d'écrire. C'est impossible. C'est à l'opposé du cinéma, à l'opposé du théâtre, et autres spectacles. C'est à l'opposé de toutes les lectures. C'est le plus difficile de tout. C'est le pire. Parce qu'un livre c'est l'inconnu, c'est la nuit, c'est clos, c'est ça. C'est le livre qui avance, qui grandit, qui avance dans les directions qu'on croyait avoir explorées, qui avance vers sa propre destinée et celle de son auteur, alors anéanti par sa publication : sa séparation d'avec lui, le livre rêvé, comme l'enfant dernier-né, toujours le plus aimé.
P28

Un livre ouvert c'est aussi la nuit.

Je ne sais pas pourquoi, ces mots que je viens de dire me font pleurer.

Écrire quand même malgré le désespoir. Non : avec le désespoir. Quel désespoir, je ne sais pas le nom de celui-là. Écrire à côté de ce qui précède c'est toujours le gâcher. Et il faut cependant accepter ça : gâcher le ratage c'est revenir vers un autre livre, vers un autre possible de ce même livre.

Cette perdition de soi dans la maison n'est pas du tout volontaire. Je ne disais pas : "Je suis enfermée ici tous les jours de l'année." Je ne l'étais pas, ç'aurait été faux de le dire. J'allais faire des courses, j'allais au café. Mais j'étais ici en même temps. Le village et la maison c'est pareil. Et la table devant l'étang. Et l'encre noire. Et le papier blanc c'est pareil. Et pour les livres, non, tout à coup, c'est jamais pareil.
P29

Et le bleu était du bleu innocent des yeux de certains de nos enfants.

Quand un livre est fini - un livre qu'on a écrit j'entends - on ne peut plus dire en le lisant que ce livre-là c'est un livre que vous avez écrit, ni quelles choses y ont été écrites, ni dans quel désespoir ou dans quel bonheur, celui d'une trouvaille ou bien d'une faillite de tout votre être. Parce que, à la fin, dans un livre, rien de pareil ne peut se voir. L'écriture est uniforme en quelque sorte, assagie. Rien n'arrive plus dans un tel livre, terminé et distribué. Et il rejoint l'innocence indéchiffrable de sa venue au monde.
P30

L'institutrice disait parfois ces trous étaient grands comme des chambres, parfois grands comme des palais, que parfois ils devenaient comme des couloirs, des passages, des développements secrets. Que toutes ces choses avaient été faites par les mains des hommes, bâties par elles. Que sur certaines argiles profondes on avait trouvé des traces des ces mains plaquées sur les parois. Des mains d'homme, ouvertes, quelquefois blessées.
- C'était quoi d'après l'institutrice, ces mains ?
- C'était des cris, elle disait, pour plus tard, d'autres hommes les entendre et les voir. Des cris dits avec les mains.
P93

- Comment sait-on cela que vous dites ?
- Comment on le sait, on le saura jamais... On sait. Sans doute parce que toujours on l'a su, toujours on a posé la question et toujours de la même façon on y a répondu. Cela depuis des milliers d'années. A chaque enfant en âge de raison on le dit, on apprend la nouvelle : "Regarde, ces trous, que tu vois, ils ont été faits par des hommes venus du Nord."
- Comme ailleurs on dit : "Regardez les pierres plates de Jérusalem, c'est là que les mères se reposaient à la veille de la crucifixion de leurs fils, ces fous de Dieu de la Judée que Rome jugeait criminels."
P94

 

dimanche 26 août 2018

La poésie, c'est quoi la poésie ?

LA POÉSIE

C'EST QUOI LA POÉSIE ?

J'ai envie de répondre à cette question en parlant de ce que la poésie n'est pas. 

Elle n'est pas un tableau qui s'affiche sur une paroi, elle n'a pas de fond.

Elle n'est pas une pièce de théâtre qui se joue sur un plateau, elle n'a pas d'acteur.

Elle n'est pas une musique qui s'entend sur une scène, elle n'a pas d'instrument.

Elle n'est pas une sculpture qui se dévoile sur un piédestal, elle n'a pas de forme.

Et pourtant, n'est-elle pas tout cela ?

Si je reprends le tableau, dans le fond, elle dessine dans les têtes tous les tableaux du monde.

Si je reprends la pièce de théâtre, elle est une actrice qui exprime des émotions.

Si je reprends la musique, elle est un instrument qui bat la mesure à sa manière.

Si je reprends la sculpture, dans la forme, elle est parfois de marbre, elle est parfois sensuelle.

La poésie, c'est indéfinissable.

PEUT-ON VIVRE SANS LA POÉSIE ?

Il faut alors imaginer un monde qui parlerait des choses avec un dictionnaire, avec des encyclopédies, avec des calculs et des lignes tracées, avec des phrases sans complément d'objet indirect.

Et dans ce monde, ne s'y mêleraient jamais la fleur dans les nuages, la mer entre les vagues, une mèche de cheveux et les oiseaux qui pleurent, ne s'y mêleraient jamais les inventions des enfants, les regards émerveillés devant les arbres qui grandissent, le bonheur de croquer une pomme et de ramasser un bouquet de violettes, ne s'y mêleraient jamais la possibilité de lire un dictionnaire à l'envers, d'arracher une page à cette encyclopédie pour la caler dans celle d'à côté, de découvrir une nouvelle formule et des lignes en pointillés, avec des phrases dont les silences sont des suspensions. Dans ce monde, il n'existerait qu'une seule couleur, une seule conduite, un seul pas, comme une envie de dictature.

Mais, le monde n'est pas une machine à laquelle il suffirait de remplacer un écrou quand celui-ci devient trop vieux.

POURQUOI DEVIENT-ON POÈTE* ?

Il ne le sait pas, il ne sait pas et il sait de moins en moins mais, il regarde partout lorsqu'il marche, il cherche sans savoir quoi mais, il marche et regarde tout autour de lui tout de même, il ramasse des objets abandonnés, des écrous parfois, oubliés ou tombés de la poche sans importance, il ramasse des mots en passant devant une abbaye, derrière un café ou sur le pont qui mouille dans la rivière sans jamais pouvoir embarquer, il n'a pas d'autre choix, il devient poète.

Le désir fou du poète est de partager ses sensations, ses colères, ses peurs indicibles qu'il tente de faire traverser avec ses seuls outils, les mots.

POURQUOI LA POÉSIE N'EST-ELLE PAS SUR LES RAYONS DES LIBRAIRES OU SI PEU  ?

La lectrice* aime s'identifier or, la poésie n'a pas de personnage phare, la lectrice aime que le sens soit direct or, la poésie est une maison avec de nombreuses portes et si chacun* a sa clef, il semblerait que tous ne sache pas qu'elle se trouve dans sa poche, la lectrice a des souvenirs de récitation or, la poésie n'est pas un concours de mémoire.

J'aime la voir partout mais, je ne la trouve pas sur les rayons des libraires ou si peu.

COMMENT RENOUER AVEC LA POÉSIE ?

Je me souviens d'un professeur d'une classe de troisième, je me souviens même de son nom. Il avait laissé le choix aux élèves d'apprendre par coeur une poésie de François Villon, la balade des pendus ou bien de l'enregistrer sur une musique de notre sélection. J'avais opté pour cette deuxième solution et retenu la musique Funeral Of Queen Mary du film Orange mécanique. Une vrai beauté cette expérience et je m'en souviens si bien.

Je ne sais plus si c'est à ce moment que j'ai appris à aimer la poésie, je ne sais plus quand j'ai commencé à écrire parce que je me suis rendue compte que j'aimais les mots, leurs jeux et leurs images. Mais, j'aimerais que chacun puisse trouver sa balade.

 
* Pour éviter les "un" et les "une", j'utiliserai dans cet article des mots uniques qui exprimeront le féminin et le masculin, le mot poète, le mot lectrice, le mot chacun.

La poésie selon Alain Cespedes : https://youtu.be/0RflwBYmGh8

Témoignages croisés d'écrivains sans roman sur le feu - L'Envolée : http://elodie-agnesotti.com/temoignages-croises/


Et vous, que répondriez-vous ?

jeudi 16 août 2018

Citation, Téo Noteboom

Écrire est pour moi une méditation sur le monde, la seule méthode de réflexion véritable. Quand je n’écris pas, ma pensée n’a pas de forme, et je ne comprends plus rien. Sans cette méditation qu’est l’écriture, ma vie ne serait pas à moi.

Teo Noteboom

Extraits de lecture 100%, Ad infinitum

AD INFINITUM
ou
comment le tablier de ma mère
se déroule dans ma vie

roman traduit de l'anglais (Australie)
par Marie-Odile Fortier-Masek


 

Née en 1950 à Sidney, l’essayiste et romancière Sue Woolfe (qui ne connaît rien aux mathématiques) est considérée comme l’un des auteurs les plus importants du continent australien. Elle a été successivement enseignante, scripte, éditrice et réalisatrice de documentaires. Ici et à jamais (Painted Woman, Allen & Unwin, 1989), son très remarqué premier roman, a été suivi de Leaning Towards Infinity (Faber & Faber, 1996) publié en français sous le titre Ad infinitum (Le Fil invisible, 2003), et de The Secret Cure (Picador, 2003).

Texte sur le derrière de couverture :

Ad infinitum est une équation à trois inconnues, trois femmes – mère, fille et petite-fille – liées par leur appartenance familiale et le monde étrange des mathématiques.

JUANITA se débat constamment entre ses devoirs de femme au foyer et sa passion dévorante de l’abstraction infinie. Elle se console en se persuadant que son fils Matti va prendre la relève et devenir un grand mathématicien.

FRANCES, meurtrie par les abandons répétés de sa mère, hérite de son génie pour les formes, l’ordre et la magie des nombres. Dans une soif éperdue de reconnaissance maternelle, elle consacre sa vie à poursuivre les hypothèses mathématiques de Juanita et à les faire reconnaître.

HYPATHIE, la fille de Frances, tente de comprendre les liens entre les trois femmes à travers l'exploration courageuse de la maternité et du génie, de l'amour et de la trahison.

Drôle, excitant et intelligent, ce livre a quelque chose de triomphant qui vous donne le vertige, celui ressenti sans doute lorsqu'on tend vers l'infini.

Extraits de lecture 100%
:

La ligne reliant deux points est présente avant même que nous la tracions.
P19

A l'époque, je m'affalais dans les fauteuils, bredouillais, m'incrustais chez lez gens, cherchais à combler les pauses entre les mots de mes collègues, sans trop savoir pourquoi, il était rare qu'on me réinvitât à dîner.
P23

En ouvrant l'invitation, je ressentie ce que les mathématiques m'avaient déjà appris, à savoir qu'un nouvel univers prend vie sitôt qu'un espace est dissocié.
P24

Je roulais des mots sur ma langue, telles de minuscules baies de cassis.
P65

Parfois les meilleures raisons ne sont pas des raisons du tout.
P111

Je pense à tout le temps que je perds alors que je pourrais être en train d'écrire, de peindre ou je ne sais quoi si je suis appelée à devenir célèbre.
P114

D'un côté le désir de continuer à jamais, de tendre vers l'infini et de l'autre celui de se retrouver, une fois au but, sans autre aspiration.
P133

Je vais filmer tout ça.
Qu'est-ce que cela expliquerait ? demandai-je.
Que seul ce que les gens connaissent paraît vrai, dit-elle.
Quand au reste, il paraît improbable.
P134

Nombreux les moments que j'aimerais revivre, histoire de changer le rôle que j'ai pu y jouer. Or, chacun de ces moments devient partie intrinsèque de notre personnalité, et le moindre changement donnerait une personnalité si différente qu'elle n'aurait pu appartenir à l'être que nous sommes devenus.
P147

J'adore penser. Je n'entends pas par là examiner tel ou tel point dans le détail, en peser le pour et le contre ou y réfléchir sérieusement, dit-elle.
P159

Je me disais qu'après tout, mon travail ne revêtit sans doute pas une telle importance. Quand j'ai enfin trouvé ce matin la raison de ma venue, cela n'a rien eu d'une révélation, cela ne s'est pas imposé à moi comme une vérité divine. Cela s'est insinué en moi, m'apprivoisant d'une façon si discrète que, plus tard, j'aurais pu croire que cela avait toujours était là, attendant que je me tourne pour regarder. Je me sentie toute bête de ne pas l'avoir vu plus tôt. Cela semblait réel, physique, impeccablement formé, émanant de moi, tout en n'étant pas moi, inéluctable mais d'une chaleureuse intimité. Comme un enfant.
P258

Sans doute remuai-je, grattai-je ou me frottai-je le nez, un de mes réflexes du corps qui a intégré la pensée, mais veut qu'on se rappelle son existence.
P264

Il en a toujours été ainsi pour moi, le savoir s'en va et s'en revient, aussi calme que l'eau. Parfois, il me comble de ses faveurs, parfois il m'abandonne. Alors je m'arrête, au milieu d'une phrase, ayant perdu mes repères. Je redoutais ces passages à vide. Quand j'étais seule, peu m'importait, car je savais qu'il reviendrait.
La réponse était là, comme depuis toujours, aussi évidente que la conjoncture de ma mère après tout ce travail. L'esprit se tourne et la voit. Pour peu que je me tourne au bon moment, pourquoi ne verrais-je pas la réponse à tout, la réponse à ma mère, à mon frère ? Mais je ne voyais jamais ces réponses. Tout ce que je sais, tout ce que je saurai jamais, relève des mathématiques.
P265

Il ne s'agit pas juste d'organiser son temps de façon différente. Un homme peut voir les choses ainsi, pas une femme. Pour une femme, il s'agit de réorganiser son âme.
P269

Ses yeux levés rappelant ceux d'un chat, des yeux qui vous cherchait dans la pièce, un regard dont l'intensité vous isole de votre univers.
P374

La mer était si noire que je n'aurais pu dire où elle devenait ciel.
P393

Mon professeur disait qu'il y en a qui toute leur vie devront se contenter de trouver des exemples intéressants.
P433

Nous ne parlons que de nos enfances. Il semblerait que tout ce que nous ayons en commun, c'est d'avoir été jadis, des enfants.
P443

Je suis loin, bien loin d'être près du but. Je vois parfois cette conjoncture miroiter. Parfois seulement. Sitôt que je regarde, elle s'évanouit. L'ai-je réellement vue scintiller juste avant les douleurs de l'accouchement ? Pourquoi ne puis-je m'en souvenir ? Ni même me souvenir de ce moment d'exaltation où elle a surgi dans mon champs de conscience, me donnant l'impression que tout était si simple... N'aurais-je jamais que le souvenir d'avoir presque découvert quelque chose ?
P447

Un paysage comme celui-ci finit à la longue par devenir votre paysage intérieur.
P452

Parfois, les idées se précipitent, bouleversent tout sur leur passage. Je les redoute autant que je les aime.
P453

Il m'arrive de me dire que le modèle de la conjoncture est déjà en moi, et qu'il ne me reste plus qu'à attendre qu'il se manifeste.
P453

C'est si facile de lui plaire, si difficile de me plaire.
P467

Avec le sevrage, ce flot entre nous faiblira. Je suis aux prises avec mes regrets. Regret de n'avoir jamais saisi le moment, regret de n'avoir jamais dit que je devrais vivre pleinement ces instants avec mon bébé, regret de savoir que ces instants avec lui ne reviendront jamais. Au lieu de cela, j'étais toujours impatiente, je n'avais qu'une envie, revenir à mes mathématiques. Je voulais vivre et, pour moi, les mathématiques étaient la vie. Le temps a donc repris le bonheur qu'il me tendait et tout ce qui me reste ce sont de misérables griffonnages dans un cahier.
P467

mercredi 15 août 2018

La nébuleuse Hélix


HÉLIX, LA NÉBULEUSE

 

En 2004, le célèbre télescope spatial Hubble partageait avec le monde entier un portrait “haut en couleur” de la nébuleuse Hélix.

Référence : NGC 7293
Nom : nébuleuse Hélix
Type : nébuleuse planétaire
Constellation : Le Verseau*



Hélix est une nébuleuse planétaire située à environ 700 années-lumière de la Terre, probablement l'une des plus proches.

Malgré un diamètre apparent équivalent à la moitié de celui de la Pleine Lune et bien qu'étant très fournie en étoiles, (mais aucune ne se révélant plus brillante que la troisième magnitude), elle reste assez difficile à repérer. 

Elle s'est formée lorsqu'une étoile semblable à notre soleil a explosé, avant de se contracter en naine blanche et d'expulser ses couches externes vers l'espace. Actuellement, le rayonnement de son noyau central irradie et réchauffe cette matière, qui se parent de couleurs vives fluorescentes. Mais la nébuleuse planétaire ne durera pas très longtemps à l'échelle astronomique. En environ 10.000 ans, ses volutes brillantes se faneront irrémédiablement, abandonnant naine blanche et comètes au froid glacial et sombre d'un espace vide.

Les astronomes, après avoir longtemps étudié la naine blanche, ont détecté un disque diffus de poussière qui l'entoure. Mais d'où provient cette poussière ? Selon eux, elle résulterait des nombreuses comètes peuplant la frange externe de ce système stellaire, qui entrent sans arrêt en collision en parsemant l'espace de débris de plus en plus fins. Il y a quelques millions d'années, avant la formation de la naine blanche, ces comètes, ainsi que probablement des planètes, parcouraient des orbites stables et voyageaient harmonieusement autour de l'étoile. Mais lorsque celle-ci a explosé, toutes les planètes intérieures ont été englouties tandis que les planètes extérieures, ainsi que les comètes, auraient alors été précipitées vers des orbites chaotiques.

Notre propre système solaire devrait subir une transformation semblable dans environ cinq milliards d'années. 



*Le Verseau est une très ancienne constellation, placée dans une région du ciel vouée à la mer en raison d'une abondance de constellations aquatiques.

Constellations limitrophes : Aigle - Baleine - Capricorne - Dauphin - Fleuve Eridan - Pégase - Petit Cheval - Poisson Austral - Poissons - Sculpteur

Nom Français : Verseau
Nom latin : Aquarius
Génitif : Aquarii
Abréviation : Aqr

mardi 14 août 2018

Leurs and my time, Yves Bonnefoy

Leurs and my time : c'est l'heure, j'attrape un de leur poème, je récupère une partie de leur vie et j'écris un poème @Bleue.


Yves BONNEFOY (1923 - 2016 >  93 ans)

Né un 24 juin à Tours, mort à Paris le 1er juillet 2016, poète, critique d'art et traducteur français. Il est considéré comme un poète majeur de la seconde moitié du XXe et du début du XXIe siècles.
Il a passé les baccalauréats de mathématiques et de philosophie au lycée Descartes de Tours, où il fit la lecture, déterminante, de la Petite Anthologie du surréalisme de Georges Hugnet, prêtée par le professeur de philosophie. Il a fait des études de mathématiques, d'histoire des sciences et de philosophie dans les classes préparatoires du lycée Descartes, puis à l'université de Poitiers, et à la Sorbonne, lorsqu'il décida en 1943 de s'installer à Paris et de se consacrer à la poésie.
Il définira la poésie comme étant une « articulation entre une existence et une parole ». Toute œuvre poétique est le fruit d'une existence. Il y a continuité entre l'être du poète, de la poétesse, et sa poésie. La parole se distingue du langage, qui est un système ; elle est une présence, par laquelle se manifeste cette existence. La parole a un caractère vivant, car elle est indissociable de l'être qui la prononce.

Vrai nom

Je nommerai désert ce château que tu fus,
Nuit cette voix, absence ton visage,
Et quand tu tomberas dans la terre stérile
Je nommerai néant l'éclair qui t'a porté.

Mourir est un pays que tu aimais. Je viens
Mais éternellement par tes sombres chemins.
Je détruis ton désir, ta forme, ta mémoire,
Je suis ton ennemi qui n'aura de pitié.

Je nommerai guerre et je prendrai
Sur toi les libertés de la guerre et j'aurai
Dans mes mains ton visage obscur et traversé,
Dans mon coeur ce pays qu'illumine l'orage.

(Du mouvement et de l'immobilité de Douve, (c) Mercure de France, 1953)



Je cherchais
 

Les mots des femmes et je tombais sur son vrai nom
Bonne foi je le jure, sur le mien
Et quand je découvrais, je me rendis compte
Qu'il s'agissait d'un château dont je m'appelais.

Habiter sa tour est un grand pays. Je naguère
Mais plus encore maintenant par mon seul ennui.
Je vais te laisser, ton prénom, ton alphabet,
Je suis celle qui cherche la douce cédille.

Je nommerai femme et je signerai
Sur toi les créneaux de la femme et je pendrai
Dans mes mots obscurs ce vieux château fantôme,
Dans mes illusions ce pays qui penche toujours.

Poème @Bleue, Je cherchais

La couleur Bleue

BLEUE, LA COULEUR
arbre bleu.jpg

Une histoire avec elle

J'ai les yeux bleus

Enfant, je choisissais toujours le pion bleu au monopoly

Adolescente, j'ai découvert le dessinateur Enki Bilal, j'aime ses noirs et ses bleus

Adulte, mon autre nom, Bleue

d'Hélix, une autre fois

Une longue histoire sans elle

Il est étonnant de se dire qu'une couleur largement présente dans la nature, si elle n'a pas de nom, n'existe pas.

"Une expérience sur une tribu actuelle :

Pour beaucoup de chercheurs, tant qu’une population n’a pas de mot pour exprimer un concept, elle peut difficilement reconnaître son existence. Intrigué par cette théorie, le chercheur en linguistique Jules Davidoff a décidé de la mettre au banc d’essai. Il s’est ainsi rendu en Namibie, auprès de la tribu des Himbas.

Le choix de ce peuple ne tient pas du hasard. Ces derniers ont en effet la particularité de ne pas avoir de mot pour désigner le bleu. Le chercheur a donc présenté à quelques volontaires un diagramme composé de 10 carrés verts et un bleu, disposés en cercle. Il leur a ensuite demandé de trouver le carré différent.

Ses résultats suggèrent un état de confusion général parmi les participants. La plupart n’ont pas pu se décider et d'autres ont pris beaucoup de temps avant de trouver la réponse. En revanche, lorsque le carré bleu a été remplacé par un carré vert d’une nuance très légèrement différente du reste, tous les participants ont été unanimes. Cette réaction tient du fait que les Himbas possèdent dans leur vocabulaire de nombreux mots pour décrire la couleur verte.

Jules Davidoff a ainsi conclu que, sans un mot pour désigner une couleur, il est beaucoup plus difficile pour nous de remarquer que celle-ci est unique."

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Michel Pastourneau, Bleu Histoire d'une couleur



https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwiHk7GspOzcAhXmz4UKHQqfCisQFjAAegQIBxAC&url=http%3A%2F%2Fwww.davidmenidrey.com%2Fiufm%2Fdocuments%2Ftravaux-mcep%2Ffiche-de-lecture-bleu.pdf&usg=AOvVaw2jOEJBnQ1YbyjzVUlK8Z10

mardi 7 août 2018

Poème @Bleue, Des fleurs noires

Des fleurs noires

J'ai déposé des dahlias noirs
ils ont poussé sur une autre planète
et dans le couloir aux portes de ver
ils ont traversé le ciel
                                                               (Photo Thierry Tuffigo)
Et mes mains sur le pommeau
36656121_2149971598617339_761073427531431936_n.jpgont avancé une canne
que mon pas traînant
manquait de faire tomber
et ton pied
comme pour bloquer
la porte aux courants d'air
a retenu mon dos
et sans me courber
je ne suis pas tombé(e)
mes yeux dans les tiens

Les fleurs du grand vent
et d'un soleil qui ne cesse de mourir
sur un horizon sans fin
un monde de sable
sans aucune trace de mes océans

Et ma colonne revit
le bleu qui pointe
ma colonne revit
à ne plus vouloir mourir
et ma colonne attrapa ces sentiments
qui ne meurent jamais
de ceux qui juste avant vécurent cette fraction
et c'est toi qui est venu me les porter
un matin
un café
et cette fraction
je l'ai tenue
je l'ai polie
elle s'élevait
elle s'en allait
ou retournait
je sais que je ne peux la retenir
mes bras qui la suivent
c'est cela revoir
c'est cela revivre

Des dahlias noirs
parce que là-bas
s'ils ne sont pas noirs
ils meurent

D'où vient ce nom ?

DEUX NAISSANCES : Incas Yé sur l'Or et Yé (Un cahier sur l'oreiller)

21 août 2017, sur le FORUM d'écriture Mot à Mot. J'ai le projet de mettre ensemble ce qui traîne un peu partout, sur des bouts de papier, dans des cahiers froissés, dans un coin de ma tête mais, comment vais-je l'appeler ? N'est-il pas vrai que c'est le titre qui me fait me pencher et soulever le livre affiché ? Et j'ai envie qu'il sonne, qu'il soit beau, qu'il raconte quelque chose et le pari est lancé, je retrouve, alors que je m'endormais, l'envie du défi que je viens de me lancer, je me réveille, j'ai l'esprit en feu, un jeu de mots ? Deux mots qui s'entrechoquent et ouvrent une porte inattendue ? Et voilà qu'il se pose. Je voyais tout d'abord un cahier. Avec du lait, cela n'aurait rien donné. Et si la phonétique s'en emparait ? Cette première phrase restera la seule "Un cahier sur l'oreiller", un support et mon sommeil éveillé, cet ouvrage, ne traitant nullement de l'or des Incas ni même de la musique pop des années 60, portera ce nom "Incas Yé sur l'Or et Yé".

7 août 2018, création du BLOG : Incas Yé sur l'Or et Yé.